La récente sortie de taxiway d’un A319 de British Airways sur l’aéroport de Billund (Danemark), le 7 février dernier, est l’occasion d’évoquer ce genre d’incident courant, dont l’issue est généralement favorable.
D’après l’IATA¹, sur la période 2009-2013, environ 23% des 432 accidents d’aéronefs commerciaux sont des sorties de piste ou de taxiway, ayant lieu majoritairement lors des atterrissages. Et 7% de ces excursions (9 cas) on entraîné le décès de plusieurs passagers.
Nous allons nous intéresser plus particulièrement ici aux excursions sans gravité, qui n’aboutissent pas à la destruction de l’aéronef et qui n’engendrent pas de blessures à ses occupants.
Un avion embourbé à proximité d’une piste ou d’un taxiway, c’est généralement une mauvaise publicité pour la compagnie concernée, mais c’est surtout un gros casse tête logistique pour les différents acteurs d’un aéroport.
Prenons le cas d’un avion qui lors de son atterrissage dérape sur un revêtement mouillé et sort légèrement de piste latéralement.

La bande aménagée² de la piste a rempli son rôle, aucun dommage sérieux n’est à signaler. En revanche, l’exploitant de l’aéroport se retrouve avec une, voire plusieurs pistes inutilisables pour un certain nombre d’heures.
La priorité reste l’évacuation de l’avion et la sécurisation de celui-ci par le SSLIA³. Il faut en effet prévenir tout risque de fuite de carburant, ou de surchauffe des freins qui ont généralement été soumis à de grosses contraintes.
Pendant ce temps, le service du contrôle aérien (qui a autorité sur la circulation des véhicules et des aéronefs sur les pistes et voies de circulation) doit gérer le trafic aérien en prenant en compte la perte temporaire d’infrastructures. Sur les terrains mono piste, un tel incident implique donc la fermeture de l’aéroport pour la durée de l’opération de dégagement de la piste.
Une fois les passagers sécurisés au chaud dans l’aérogare, reste un problème de taille à régler : comment sortir un avion de plusieurs dizaines voire centaines de tonnes de ce bourbier ?
Dans un premier temps, l’appareil doit être allégé au maximum. Si les moyens logistiques le permettent, les fluides sont retirés (eau potable, eaux usées), et les soutes sont vidées (cargo, bagages…). Il peut parfois être nécessaire de vidanger les réservoirs par transfert du carburant vers des citernes mobiles.
C’est ensuite qu’interviennent des équipes spécialisées dans le levage d’aéronefs, afin de libérer les trains d’atterrissage pris dans la terre. La technique consiste à soulever l’avion, puis les trains, afin de déposer ceux-ci sur des plaques métalliques. L’avion sera ensuite tracté sur la piste.
Il y a donc à la fois un travail de levage et de terrassement effectué au niveau des trains d’atterrissage.
Le levage de l’avion est effectué au moyen de coussins (ou vérins souples), généralement fabriqués par les sociétés Pronal ou Musthane. Chacun de ces coussins peut soulever jusqu’à 60 tonnes.
Une fois l’avion surélevé, des vérins hydrauliques, sorte de crics, sont glissés sous les fûts de trains afin de soulever les roues.

Des plaques de métal sont alors disposées pour créer un cheminement jusqu’à la piste, puis l’avion est reposé en douceur sur ces plaques.

Il ne reste alors plus qu’a tracter l’avion sur la piste. Si la configuration est favorable, un tractage classique avec la barre attachée sur la roulette de nez suffira. Mais parfois il faut faire preuve d’imagination en tractant directement sur le train principal (qui est conçu pour encaisser ce genre d’efforts).
La dernière étape consiste à nettoyer la piste et ses abords afin de la rendre dans les meilleurs délais au contrôle aérien qui sera ravi de récupérer son outil de travail !

¹ International Air Transport Association
² Aire comprise dans la bande de piste et nivelée à l’intention des aéronefs auxquels la piste est destinée, pour le cas où un aéronef sortirait de la piste.
³ Service de Sauvetage et de Lutte contre l’Incendie des Aéronefs